mardi 23 février 2016

Lecture commentée : No et moi - Delphine de Vigan

Titre : No et moi

Auteur : Delphine de Vigan (née en 1966)

Date de parution : 2007

Mon édition : Jean-Claude Lattès

Ma collection : Le Livre de Poche

Le prix auquel je l'ai acheté : emprunté

Genre : Roman

Nombre de pages : 250

Résumé :


     Lou Bertignac a 13 ans et est en seconde. Son Q.I. de 160 lui vaut un excellent niveau scolaire et des activités farfelues. Un jour, Monsieur Marin lui impose de faire un exposé, sa plus grande peur. Alors elle choisit de le faire sur les femmes qui vivent dans la rue. Puis elle rencontre No, une fille à peine plus âgée qu'elle et qui vit dans les gares, les rues, qui vagabonde, erre, le jour et la nuit. No et Lou deviennent vite amies, mais No va mal. Alors Lou l'accueille chez elle. Ils vivent heureux, puis No sombre à nouveau dans les tourbillons noirs de la "mauvaise vie". Les parents de Lou sont contraints de la chasser de chez eux. Lou est inquiète et triste, mais Lou sait que No n'est pas sous le vent glacial de l'hiver ; Lucas, leur ami commun, la loge. Mais jusqu'à quand, et à quel prix ?

Extraits :

"C'est comme si No avait toujours été là. De jour en jour nous la voyons reprendre des forces. Nous voyons son visage changer. Et puis sa façon de marcher. Nous la voyons relever la tête, se tenir droite, laisser son regard s'attarder."

"Dehors des femmes et des hommes dorment enfouis dans des sacs de couchage ou sous des cartons vides, au-dessus des bouches de métro, sous les ponts, ou à même le sol, dehors des femmes et des hommes dorment dans les recoins d'une ville dont ils sont exclus."

                               

Les personnages principaux :

Lou Bertignac : jeune surdouée de 13 ans et un Q.I. de 160, elle est la protagoniste et narratrice du roman. Elle est le moi du titre. C'est une jeune fille sensible, qui collectionne les mots saugrenus, observe les gens, fait des "expériences domestiques", jusqu'à ce qu'elle rencontre No, et s'interroge sur le sens de la vie, de l'existence, et sur la place de l'homme dans l'univers.

Nolwenn, alias No : jeune fille d'environ 18 ans. Après avoir été abandonnée de son père et envoyée en foyer, puis famille d'accueil, et de nouveau foyer, No erre à présent dans les gares et les rues de Paris. Au début du roman plutôt enjouée malgré sa situation, No va devenir de plus en plus noire, et de plus en plus volage à la fois au cours du roman. A la fin, No n'est plus qu'une ombre obscure qui déchire le cœur de Lou.

Lucas : lycéen et ami de Lou, il est ce que l'on pourrait appeler le "populaire du lycée". Lou en est follement amoureuse, mais ça n'ira jusqu'à la toute fin du livre pas plus loin qu'une belle amitié. Lucas vit seul, ses parents ne sont plus là, et il héberge No dans le dernier tiers du roman.

                               

Mon avis :

      Ce livre est tout simplement extraordinaire. Lorsqu'on me l'a prêté, je m'attendais à un livre quelconque, banal, sans intérêt particulier. J'ai très vite changé d'avis ! Très sincèrement, alors qu'il pourrait a priori se mettre dans la case "roman adolescent", No et moi est un véritable morceau de littérature ! Ce d'abord par l'intérêt qu'il suscite. En effet, certes, il y a la question de l'inégalité, mais c'est quelque chose de déjà vu. Certes, il y a des réflexions sur l'adolescence. Mais le plus intéressant est la nuance philosophique faite souvent par Lou entre le monde subjectif et le monde objectif. D'un point de vue subjectif, nous ne voyons que le monde selon nous ; d'un point de vue objectif, le monde nous écrase à nous faire couler les larmes ; c'est ce "ciel bas et lourd des poésies". Et c'est en passant du point de vue objectif que l'on se rend compte que les villes et les choses sont des villes et des choses "de papier" (La Face cachée de Margo - John Green).
     Au-delà de l'intérêt, ce qui fait de ce roman une oeuvre littéraire et qui le sort de sa case "livre adolescent", c'est l'écriture de l'auteure ! C'est tout simplement fascinant. De Vigan maîtrise tellement bien la langue qu'elle se permet des erreurs volontaires, des libertés, quant à la syntaxe, mais surtout en ce qui concerne la ponctuation. C'est une écriture fluide, délicate, et chargée en émotion. Pourrait-on concevoir cette écriture dans le contexte d'un point de vue externe ? Ce serait du génie ! Dans No et moi, le point de vue interne accentue l'émotion. Cependant, je trouve dommage la construction de la courbe émotive du roman. En effet, si l'on devait reprocher quelque chose à ce livre, ce serait de nous laisser un peu sur notre faim. Alors que l'on aimerait que la fin explose et nous éparpille en mille morceaux, elle est bien plus - trop ? - doux, par rapport aux poignards émotionnels que nous plante l'auteure par-ci par-là, partout ailleurs dans le roman.
     Pour bien comprendre le style de De Vigan, je pense qu'il faut connaître Marguerite Duras. Quelles similitudes d'écriture entre No et moi et L'Amant ! La seule différence : Duras écrit des phrases courtes, de Vigan des phrases longues. Mais est-ce véritablement une différence, en cela que les phrases de De Vigan sont certes longues, mais très coupées. Alors une proposition de l'auteure de No et moi équivaut à une seule phrase de Duras. Et Duras n'est pas de la plus médiocre littérature qui soit !

Ma note :

Critères
Barème
Écriture
14,5/16
Style

04/04
Fluidité

03/03
Richesse du vocabulaire

02,5/04
Difficulté de compréhension

03/03
Mouvements du texte ( plat, très dynamique, alterné )

02/02
Histoire
17,5/19
Intérêt

03/03
Importance des personnages et familiarisation entre eux et le lecteur

03/03
Captivant ou ennuyeux ?

05/06
Émouvant ?

05/05
Crédibilité / Cohérence

01,5/02
Le livre
01,5/03
Goût personnel
02/02
Total
35,5/40

17,75/20

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